El meu país – Mon pays
L’écriture de Josep Pla est avant tout le résultat du regard d´un homme qui, par le lien fusionnel qui l’unit à la langue et au paysage, se sent capable d’interpréter le monde et de le réorganiser à partir de son écriture en créant des formes d’identité. Les êtres et le paysage se fondent pour former un tout, dans une sorte de géographie humaine où le regard local, plus qu’une façon de regarder, de voir et de penser le monde, se transforme en une exigence littéraire, un exercice de style, “une méthode de travail”. Il s’agit d’une vision du monde volontairement limitée à l’échelle individuelle et locale parce que, en fait, c’est la seule qui soit compréhensible et assimilable par l´homme. C’est une vision du monde qui impose l’acceptation des choses les plus simples, les plus quotidiennes, les plus banales.
“Je fais partie d’une certaine tribu. Cette tribu occupe une certaine zone géographique, a une manière absolument personnelle de voir le monde, parle une certaine langue, pauvre, peu travaillée, misérable – elle constitue ce que l’on commence à appeler une zone linguistique.”
Josep Pla. Notes disperses. OC XII, 575.
Homenots – Grans personages
Dans les années cinquante, Josep Pla a peu à peu donné une valeur morale et une dimension collective à sa démarche personnelle de récupération de la mémoire. Si, dans un premier temps, il fonda cette littérature de mémoire sur des éléments tels que le paysage, la cuisine ou les métiers, l’année 1958 marqua le début de la publication d’une série de volumes intitulés Homenots, véritable galerie de portraits des catalans illustres de son siècle : artistes, écrivains, intellectuels, mais aussi chefs d’entreprise, économistes ou notaires. Déjà dans ses premiers livres de jeunesse, Pla avait pratiqué le portrait comme genre littéraire ou exercice de style, mais à présent il y ajoutait une nouvelle dimension : il s’agissait de sauver de l’oubli toute une Catalogne qui était en voie de disparition.
“La seule façon de lutter contre la terrible invasion de l’oubli, de créer une mémoire collective, c’est de rappeler, inlassablement, ce que quelques hommes – c’est-à-dire le peuple – ont fait qui aille un peu au-delà des intérêts personnels, immédiats et petits.”
Josep Pla. Homenots. OC XVI, 7.